Pleuvoir

L’air était lourd humide et frais. Une éblouissante lueur grisâtre remplissait le ciel orageux du jour. Notre astre de vie était pris au piège dans une strate perdue de vue. Une ombre ondulait au sol, accompagnant les rafales de vent qui semblaient comme enchaînées aux arbres. Ces branches tortueuses et fines s’accrochant aux nuages ; des racines ancrées profondément, rampaient hors de leur tombe de béton. Ces plantes étaient regroupées dans le coin Est de la Place Bellecour, placées de façon symétriques, des machines alignées, vivantes, ne servant qu’aux autres. Ces autres, Elle les méprise.
Aujourd’hui, midi, Elle n’est là que pour le pire. La place s’est vidée, l’atmosphère est sombre, étouffant, cette ambiance émane de sa vie-même. Le ciel semble se contracté un instant, des gouttes viennent tachetées le sable roux à ses pieds. La Terre nous offre ce que l’on mérite, Elle mérite la pluie avant sa délivrance. Ses pas réguliers, confiants, sont à peine audibles au-dessus du son hypnotisant de l’eau caressant l’air. Dans cette solitude momentanée tout prend une dimension démesurée, elle perçoit la beauté de l’irréel, les murmures des choses disparues, détruites par ces êtres pitoyable dans leur bêtise, dans leur aveuglement. Ces autres si différents, si semblables, mais personne parmi eux ne lui ressemblant.
Aujourd’hui elle marche à travers cette place vide, l’allégorie d’un monde qu’elle aurait aimé plus beau. Elle marche…
Elle, vous la connaissez, c’est celle qui vous observe, qui vous fixe avec ses yeux bleus comme le ciel ces jours où nous restons enfermés chez nous, à l’abri d’un Soleil révélant nos plaies ouvertes.

Opal-Sky~